Cerebro #3

from Cerebro by SeMoNO!LinA

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lyrics

YOUNG WOMAN WITH A PEARL

Dear God,
One, here is my chin. It is small and rather square. The teeth are healthy-looking and do not mask any imperfections. Dear friend, do not be fooled, this chin does not mask any imperfection. Although it juts out, such apparent determination is not necessarily a bad thing, even for a woman.
The chin does not mask any imperfection. Indeed, what imperfection could be masked by such a chin? What imperfection?
Believing oneself too beautiful, or too something else?
True, we live in a civilisation in which being excess to requirements is problematic. But, on the other hand, the chin is elusive. It shies way and is not beautiful. The character shies away, the forehead is sombre, the woman largely absent.
It is a hidden woman; her character remains elusive. Moreover, she is not beautiful, her character remains elusive.
Have we ever seen a woman with such a character? She hides her thoughts and inner restlessness. A woman like that…a woman like this is akin to stagnant water: we don’t know where to stand without getting bogged down and irremediably losing our footing.
Women like this are not beautiful. They are like boggy marshland. Once I even saw secretions trickling down the bosom of one such woman and, while she was not actually slobbering, secretions still trickled down her bosom.
Upon reflection, as God is my witness, a woman like that - like this woman – should have been beautiful! But she was not beautiful.
A woman like that could be beautiful.
A dead bird can also be beautiful.
But with her elusive chin pointing outward, this woman was lost to the cause: the cause of women with positive features.
And this is why, Dear God, I say today that the chin is hugely important: more than a part of the body, more than any temporary facial appendage, it is the very truth of the face that is at stake. Dear God, I hold no grudge against you but my chin juts out, even though in some ways this may be interpreted as a positive sign of my existence…
Even though in some ways the cloud formations stacked or piled like snow have not managed to turn this into a sign that invalidates any right to existence…
Even though I now realize that this chin has played tricks on me and that sometimes, when I have finished besmirching it, “shitting” on it or removing spermatic traces of my existence from it - egg yolk, for example, or toothpaste (even trapped after the morning exercise that consists in believing that we can be clean and overcome the general disorder - even on such mornings we do not succeed), I always end up making it pay for this certain something for which I am otherwise convinced that it should not have to pay...
What is more tormenting than a chin viewed in a mirror? This is how I eventually lost myself by continuing to look in the mirror. It is obvious that for many, particularly in this land of France, such a detailed examination stems from an acute form of narcissism.
My predecessors in narcissism claim that understanding the limits of oneself requires the greatest efforts and are most important to know. They are important because (within this design focusing on self-knowledge) this gives rise to a demand for the most complete and naked truth as it requires jettisoning an idea of oneself. This idea of oneself is founded on no more than the frailty that all beings carry within them from the cradle to the grave. Know thyself, a Socratic injunction that never ends for the simple reason that this end is merely the end of a path!
This is among the cruellest of knowledge because accepting oneself like this in the most naked of states is tantamount to never putting on a show when you never know where you are and could only manage to do so by employing enormous efforts of showmanship.
Moreover, if you do not know your own self, who can know you?
I made the mistake of believing that we could breeze through the world blindly. It is a mistake - I am now certain of this! – to believe that we can know when we do not see. And we cannot see when we don’t know who we are. I was also mistaken in my vague childhood impression (vague because it was never clarified) that I was able to predict the network of forces that structure the world… When I was a child, I believed that we could easily throw off the cloak of one’s preconceptions comprising the understanding that flew in the face of experience...But first I had to examine myself.
WOMEN (BIS)
LEMENTON
In this sort of case, the chin is the most noteworthy appendage, the crudest manifestation. We get to know ourselves by dint of learning to get to know ourselves. Is this not where the work was required? She turned around, impassive on the chair… Ill at ease nonetheless! She had tried to pare back the appendage in question a few years before but had not been able. Dear God, she hadn’t been able!

Traduction
Cher Dieu
Un, voici mon menton. Il est petit, plutôt carré. Les dents sont saines et ne dissimulent aucune imperfection. Cher ami, ne croyez pas, ce menton ne dissimule aucune imperfection. Il est volontaire certes mais, même pour une femme, la volonté n’est pas une mauvaise chose.
Le menton ne dissimule aucune imperfection. Quelle imperfection,
d’ailleurs, pourrait dissimuler un tel menton ? Quelle imperfection ?
Celle de se croire trop belle, trop quelque chose ?
C’est vrai qu’on est dans une civilisation où si l’on est de trop, c’est déjà trop. Mais, de l’autre côté, le menton fuit. Il fuit, il n’est pas beau. Le caractère est fuyant, le front sombre, la femme peu présente.
C’est une femme dissimulée ; son caractère fuit. De même, elle n’est pas belle, son caractère fuit !
A t-on vu un tel caractère chez une femme ? Elle dissimule des sombres pensées, des agitations souterraines. Une femme comme ça… Une femme comme celle-ci, c’est de l’eau stagnante : on ne sait pas où mettre les pieds sans s’enfoncer, se perdre irrémédiablement.
Elles ne sont pas belles, les femmes comme ça, de véritables marais poitevins. J’ai même vu une fois des humeurs dégouliner sur la poitrine de celle-ci. Elle ne bavait pas, certes, elle ne bavait pas, mais les humeurs dégoulinaient sur sa poitrine.
Après réflexion, une femme comme ça, comme celle-ci, Dieu m’en est témoin… Aurait du être belle ! Or elle n’était pas belle…
Une femme comme ça peut être belle.
Un oiseau mort aussi, cela peut être beau.
Mais, elle, le menton fuyant en avant, c’était perdu pour la cause. La cause des femmes à versant positif.
C’est pour ça, Cher Dieu, je dis aujourd’hui que le menton, ça compte énormément : plus qu’une partie du corps, plus qu’un appendice ponctuel du visage, c’est la vérité même de celui-ci qui est en cause, Cher Dieu, je ne vous en veux pas, mais le mien est volontaire et, même si à quelque endroit, cela peut être interprété comme un signe positif de mon existence…
Même si à quelque endroit, les nuages formés en tas, en amas de neige n’auraient pas réussi à en faire un signe invalidant tout droit à l’existence…
Même si… Hé bien, je constate, aujourd’hui, que ce menton m’a joué des tours. Et que, parfois, quand j’en ai fini de le barbouiller, de le « conchier » ou de l’arroser de traces spermatiques de mon existence, de jaune d’œuf par exemple, ou de dentifrice (même coincée dans l’exercice matinal qui consiste à croire que l’on puisse être propre et quelque peu parvenir à vaincre la « chienlit » ; hé bien, même ces matins-là, l’on ne réussit pas), je finis toujours par lui faire payer ce quelque chose dont, par ailleurs, je suis convaincue qu’il n’a pas à payer…
Quel tourment qu’un menton vu dans un miroir ? C’est ainsi que je me suis perdue à force de me regarder dans le miroir. C’est bien évident que, pour beaucoup, en particulier dans ce pays français, un tel examen aussi poussé, aussi détaillé relève d’un narcissisme étroit.
Mes prédécesseurs en narcissisme disent que les limites de soi-même sont ce qui demande le plus d’efforts à apprécier et des plus importantes à connaître ! Importantes car, là, (dans ce dessein visant la connaissance de soi-même) surgit l’exigence de vérité totale, la plus cruelle, car elle demande à se séparer d’une idée de soi-même ! Cette idée de soi-même n’a pour fondement que la fragilité que tout être véhicule de sa naissance à sa mort. Connais-toi toi-même, exigence socratique dont on ne voit jamais le bout, pour la bonne raison que ce bout n’est juste que la fin d’un chemin !
Cette connaissance est de la sorte des plus cruelles car s’accepter ainsi, dans sa nudité la plus totale, revient à ne jamais se mettre en scène, là où, pourtant, je ne sais jamais où je suis et que je n’y parviendrais que par des
efforts terribles de mise en scène.
En outre, si tu ne te connais pas, qui va donc te connaître ?
J’ai commis l’erreur de croire qu’on pouvait se trimbaler dans le monde tout en étant aveugle. C’est une erreur, j’en ai maintenant la certitude, de croire que l’on peut savoir quand on ne voit pas. Et l’on ne voit pas quand on ne sait pas qui l’on est. Une autre erreur est l’impression que j’ai eu, enfant, vaguement (puisque ce sentiment ne s’est jamais précisé) de pouvoir prévoir le réseau de forces qui structurent le monde... J’ai cru, comme enfant, que l’on pouvait se débarrasser facilement du voile de ses préconceptions, de l’entendement qui allait à l’encontre de l’expérience… Mais j’ai d’abord dû m’examiner.
LAFEMME (BIS)
LEMENTON
Le menton est dans cette sorte d’affaire l’appendice le plus notoire. La chose la plus crue. C’est en se connaissant qu’on se connaît. Le travail était là, n’était-il pas ? Elle se retourne, elle est impassible, sur sa chaise… Mal à l’aise, néanmoins ! Elle a essayé de rogner le susdit appendice quelques années plus tôt, n’y est pas parvenue. Cher Dieu, elle n’a pas réussi!!!

credits

from Cerebro, released June 28, 2014

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SeMoNO!LinA Clisson, France

This musician attaches high importance to experimenting, Amaury Bourget tests out, works and proposes different creations which vary from live to sound installation, from composition to improvisation, from electroacoustic to instrumental music... He is indeed concerned with putting the “act” of creation to the forefront. He does not use modern technologies, but prefers recycling outdated materials ... more

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